La réglementation des compléments alimentaires vise à encadrer la sécurité, l’efficacité et l’étiquetage de ces produits de plus en plus populaires. En Europe, la Directive 2002/46/CE fixe des normes strictes pour garantir la conformité des compléments alimentaires avant leur mise sur le marché, tandis que des variations existent à l’international.
Découvrez dans cet article la réglementation nutraceutique dans le monde (Canada, Japon, Etats-Unis, Australie, Brésil et Europe), ainsi que les règles à respecter pour une commercialisation réussie de vos compléments alimentaires !
Etat des lieux sur la réglementation nutraceutique
Complément alimentaire : de quoi parle-t-on ?
Les compléments alimentaires sont définis par la Directive 2002/46/CE de l’Union Européenne comme des « denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d’autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique, seuls ou combinés, commercialisés sous forme de doses, à savoir les formes de présentation telles que les gélules, les pastilles, les comprimés, les pilules et autres formes similaires, ainsi que les sachets de poudre, les ampoules de liquide, les flacons munis d’un compte-gouttes et les autres formes analogues de préparations liquides ou en poudre destinées à être prises en unités mesurées de faible quantité” [1].
Les nutraceutiques peuvent jouer un rôle important dans notre alimentation, apportant des vitamines, minéraux, ou d’autres ingrédients actifs aux consommateurs cherchant à améliorer leur bien-être, leur santé, leur beauté ou à pallier des carences nutritionnelles spécifiques.
Le marché mondial de la nutraceutique
Le marché mondial des compléments alimentaires est en pleine croissance, avec une valeur de 182 milliards de dollars en 2023. Ce secteur en plein essor est dominé par les États-Unis, qui détiennent près d’un tiers des parts de marché [2].
En Europe, le marché des compléments alimentaires est estimé à 21,6 milliards de dollars en 2024 et devrait atteindre 33,3 milliards de dollars d’ici 2029, avec une croissance de 9,01% sur la période 2024-2029 [3].
En France, le marché nutraceutique atteint environ 2,7 milliards d’euros en 2023 [4]. Les compléments alimentaires sont devenus très populaires parmi les consommateurs français, avec 61% d’entre eux en ayant consommé au cours des deux dernières années [5].
La demande mondiale en compléments alimentaires est en constante augmentation, portée par une approche holistique préventive de la prise en charge de la santé grâce à des solutions nutritionnelles alternatives.
Les spécificités régionales, notamment en termes de réglementation, influencent grandement la diversité des produits proposés sur les marchés internationaux.
Tour du monde de la réglementation des compléments alimentaires
Dans le monde
À l’échelle internationale, le Codex Alimentarius, créé par la FAO (Organisation pour l’alimentation et l’agriculture) et l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), établit des normes alimentaires globales. Le Codex fournit des directives pour la sécurité et l’étiquetage des compléments alimentaires, notamment pour les vitamines et les minéraux.
La réglementation des compléments alimentaires varie considérablement d’une région à l’autre, mais certains cadres législatifs influencent largement la dynamique internationale.
États-Unis : Dietary Supplement Health and Education Act (DSHEA)
Aux États-Unis, la loi DSHEA (Dietary Supplement Health and Education Act) de 1994 régit le secteur des compléments alimentaires. Elle définit les nutraceutiques comme “des vitamines, minéraux, herbes, acides aminés, et autres substances nutritionnelles” [6].
La commercialisation de compléments alimentaires ne nécessite pas d’approbation préalable de la FDA (Food and Drug Administration), contrairement aux médicaments. Ainsi, la responsabilité des fabricants de nutraceutiques est centrale : avant même la mise sur le marché, ils doivent s’assurer que leurs produits sont sûrs et conformes aux normes en vigueur.
Les allégations de santé faites par les fabricants doivent obligatoirement être étayées par des preuves scientifiques. La FTC (Federal Trade Commission) se charge de surveiller les allégations publicitaires pour éviter toute tromperie.
Enfin, l’étiquetage des compléments alimentaires doit être complet, incluant des informations précises sur les ingrédients, les doses journalières recommandées, ainsi que les précautions d’usage, garantissant ainsi une transparence maximale pour les consommateurs.
Autres pays
Au Canada, les compléments alimentaires sont classés comme produits de santé naturels et doivent obtenir une autorisation préalable de Santé Canada avant d’être commercialisés.
En Australie, la Therapeutic Goods Administration (TGA) régule les compléments classés comme thérapeutiques, avec des règles strictes sur leur production et leur mise en marché.
Le Japon impose une réglementation particulière aux compléments alimentaires classés comme FOSHU (Food for Specified Health Uses), nécessitant une approbation du gouvernement avant leur commercialisation.
Au Brésil, la réglementation des compléments alimentaires est encadrée par l’ANVISA (Agence Nationale de Surveillance Sanitaire), chargée de garantir la qualité, la sécurité et l’efficacité des produits. Les ingrédients autorisés, les allégations de santé, l’enregistrement des nutraceutiques avant la commercialisation et les contrôles de qualité sont soumis à des règles établies par cette agence.
En Europe
L’Union Européenne, à travers la Directive 2002/46/CE, vise à harmoniser la réglementation des compléments alimentaires, en particulier ceux contenant des vitamines, minéraux et autres substances actives.
Cette directive impose une régulation stricte sur plusieurs aspects clés, notamment l’étiquetage, mais aussi l’évaluation des risques liés à l’introduction de nouveaux ingrédients assurée par l’EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments). Cet organisme valide également les allégations de santé formulées par les fabricants, ces dernières devant reposer sur des preuves scientifiques fiables.
L’EHPM (European Federation of Associations of Health Product Manufacturers) (EHPM) est une organisation européenne qui regroupe les fabricants et distributeurs européens de produits de santé. Elle est la principale association professionnelle européenne représentant le secteur des compléments alimentaires. Elle aide les entreprises à se conformer aux lois de l’UE et à garantir la production de produits conformes et de haute qualité.
Malgré cette harmonisation à l’échelle européenne, des variations nationales subsistent. Certains pays de l’UE appliquent des restrictions spécifiques sur l’utilisation d’ingrédients comme les extraits de plantes, voire les soumettent à un monopole pharmaceutique, ce qui engendre des différences dans la commercialisation des compléments alimentaires d’un état à l’autre.
En France
En France, la réglementation des compléments alimentaires est encadrée par le décret n°2006-352, qui transpose la Directive 2002/46/CE de l’Union européenne. Ce cadre législatif vise à garantir la sécurité des produits et leur conformité avant leur commercialisation.
Le Synadiet (Syndicat National des Compléments Alimentaires) est l’association professionnelle française qui représente les entreprises du secteur des compléments alimentaires. Cet organisme joue un rôle clé dans l’information et la sensibilisation des fabricants, en veillant à ce qu’ils respectent les normes en vigueur.
Réglementation des compléments alimentaires : les 5 règles d’or pour un lancement produit
Déterminer la composition nutraceutique
Chaque ingrédient utilisé dans les compléments alimentaires doit être autorisé et inscrit sur des listes spécifiques qui précisent les doses maximales autorisées et les conditions d’emploi. Ces règles tiennent compte des apports nutritionnels recommandés et des limites de sécurité basées sur des études scientifiques. Par exemple, les quantités maximales de vitamines et minéraux dans un produit sont déterminées en fonction des apports quotidiens recommandés, tout en considérant les contributions provenant d’autres sources alimentaires.
Présenter un étiquetage conforme
L’étiquetage des compléments alimentaires doit inclure des informations obligatoires. En Europe, les étiquettes doivent mentionner le logo bio de l’UE et le nom de l’organisme certificateur si le produit est certifié biologique (ou si plus de 95% d’ingrédients sont d’origine bio). D’autres mentions indispensables incluent la représentation graphique, la dénomination commerciale, le poids net, la date de durabilité minimale ou date limite de consommation, le numéro de lot, le responsable de la mise sur le marché, les précautions d’emploi spécifiques, la teneur en caféine si présente, le tableau de composition et la portion journalière recommandée. Il est aussi requis de lister les ingrédients et les allergènes en gras. Certaines mentions, comme le nom du produit et le poids net, doivent apparaître dans le même champ visuel [7].
Selon la directive 2000/13/CE, l’étiquetage doit également porter les indications obligatoires suivantes : un avertissement contre le dépassement de la dose journalière indiquée, une déclaration visant à éviter que les compléments alimentaires ne soient utilisés comme substituts d’un régime alimentaire varié et un avertissement indiquant que les produits doivent être tenus hors de la portée des jeunes enfants [1].
Des mentions facultatives, telles que les allégations nutritionnelles et de santé, la dénomination légale de vente (peut être complétée “à base de plantes”), ou encore le logo Agriculture Biologique, peuvent également figurer sur l’étiquette [7].
Garantir l’efficacité du complément alimentaire
Les allégations concernant un nutraceutique, qu’elles apparaissent dans les publicités, les conseils en magasin ou sur les étiquettes, sont strictement encadrées. Avant d’utiliser une nouvelle allégation, un fabricant doit soumettre une demande à l’EFSA (Autorité Européenne de Sécurité des Aliments). Si l’avis de l’EFSA est favorable, la Commission européenne peut adopter un règlement validant ou non l’allégation. Les allégations sont régulées par le règlement (UE) 1924/2006, qui définit les règles sur les allégations nutritionnelles et de santé en Europe [7].
Deux types d’allégations peuvent figurer sur les compléments alimentaires :
- Les allégations nutritionnelles, telles que « Source de » ou « Riche en », soulignent la présence d’un nutriment spécifique.
- Les allégations de santé, comme « Le magnésium contribue à réduire la fatigue », indiquent qu’un ingrédient a des effets bénéfiques sur la santé.
Déclarer son complément alimentaire avant sa commercialisation
Avant leur commercialisation, les compléments alimentaires doivent être examinés par les autorités compétentes. En France, il est obligatoire de déclarer tout complément alimentaire sur Compl’Alim. La DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a mis en place cette nouvelle plateforme en ligne (anciennement Téléicare) pour la déclaration des compléments alimentaires avant leur mise sur le marché. Cette procédure permet aux fabricants de soumettre la composition du produit, les précautions d’emploi ainsi que l’étiquetage. La DGCCRF dispose alors de deux mois pour examiner la conformité et la sécurité du complément alimentaire avant d’émettre son avis : approbation, demande de modification ou rejet [7].
Assurer la sécurité du complément alimentaire
La sécurité des nutraceutiques est assurée par des contrôles menés par les DDPP (Directions Départementales de la Protection des Populations). Ces inspections couvrent plusieurs aspects, notamment la conformité des étiquetages, la vérification des allégations et la composition des produits, souvent via des analyses en laboratoire. Si une irrégularité est constatée, les autorités peuvent imposer des sanctions administratives ou pénales, selon la gravité des infractions [7].
Focus : la réglementation des compléments alimentaires beauté
Les mesures d’efficacité
La réglementation des allégations de beauté pour les compléments alimentaires est un cadre crucial pour les opérateurs de ce secteur. Contrairement aux allégations de santé, régies par le règlement (CE) n° 1924/2006, les allégations de beauté doivent être justifiées par des preuves solides comme des études cliniques. Que ces études portent sur les rides, l’élasticité, l’hydratation de la peau, ou la force et la résistance des cheveux, elles doivent être rigoureusement menées sur une population représentative et respecter des critères d’inclusion et d’exclusion précis. L’utilisation de modèles in vitro, bien qu’utile pour les premières phases de recherche, doit être complétée par des essais cliniques qui valident l’efficacité des ingrédients actifs. Une méthodologie d’évaluation bien choisie est essentielle pour garantir la pertinence et la fiabilité des allégations [8].
La communication sur la beauté
La notion de beauté étant subjective, les allégations relatives à l’apparence doivent être formulées avec précaution pour éviter toute confusion avec les allégations de santé.
Afin d’assurer des pratiques de communication rigoureuses, Food Supplements Europe recommande aux acteurs du secteur de rédiger un document dédié qui résume les données justifiant les allégations. Ce document pourra être présenté aux autorités lors de contrôles, en complément du rapport d’étude clinique et/ou de la littérature scientifique publiée. Les entreprises doivent veiller à ce que les informations communiquées soient claires, précises et compréhensibles, tout en respectant les règles éthiques du secteur.
Pour aider les acteurs du secteur nutraceutique à définir des allégations beauté pour leurs compléments alimentaires, des exemples ont été compilés ci-dessous, en s’appuyant sur les directives et avis publiés par l’EFSA [8] :
Allégations de santé pour la peauExemples d’allégations de beauté correctes pour la peau
Exemples d’allégations de santé nécessitant une autorisation avant utilisation
Allégations de santé pour les cheveuxExemples d’allégations de beauté correctes pour les cheveux
Exemples d’allégations de santé relevant du champ d’application de la directive sur les produits de santé naturels et nécessitant une autorisation avant utilisation
Allégations de santé pour les onglesExemples d’allégations de beauté correctes pour les ongles
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SOURCES :
[1] DIRECTIVE 2002/46/CE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 10 juin 2002 relative au rapprochement des législations des États membres concernant les compléments alimentaires
[2] Nutrition Business Journal, conférence tenue à Vitafoods 2024
[3] Mordor Intelligence. Analyse de la taille et de la part du marché des compléments alimentaires en Europe – Tendances de croissance et prévisions (2024-2029)
[4] Synadiet. Les Français et les compléments alimentaires en 2023.
[5] Synadiet. Baromètre 2024 de la consommation des compléments alimentaires
[6] National Institutes of Health. Dietary Supplement Ingredients Database, 2023
[7] Synadiet. L’essentiel des compléments alimentaires et produits de santé naturels, 2021
[8] Food Supplements Europe. Guidelines for the Substantiation of Beauty Claims for Food Supplements, 2014